Une délicieuse science napolitaine
Ce qui compte réellement dans une pizzeria, c’est le contenu de votre assiette : une pizza, pétrie à base de farine napolitaine, cuite dans un four napolitain et garnie de produits régionaux. Certes, elle est impossible à imiter en dehors de Naples. Mais celles et ceux qui veulent mettre la main à la pâte se mettront à l’école d’Enzo Coccia, le seul et unique « professeur Pizza ».
Pétrie de science
Ce surnom n’a pas été choisi au hasard : en collaboration avec l’université de Naples, Enzo a mené une recherche scientifique sur la pizza. Et notamment sur la base de ce produit : la pâte. Sa principale instruction ? Façonnez des boules de pâte de 180 à 250 grammes et laissez-les lever pendant six à douze heures. « Vous obtenez ainsi une pizza très digeste », souligne Enzo. « Et une pâte facile à pétrir. Celle-ci doit toujours être moelleuse et élastique. » Oui, vous avez bien lu : la vraie pizza napolitaine n’est pas croquante.
Travail en tandem
Enzo est pizzaiolo. Il presse la boule de pâte en un disque homogène, qu’il garnit d’ingrédients. D’abord, il étale la sauce tomate – fraîchement préparée à base de tomates locales – à la cuillère. Ensuite, il saupoudre la pizza de basilic et la couvre de rondelles de mozzarella. Un filet d’huile d’olive couronne le tout, et le fornaio prend le relais. Celui-ci glisse la pizza dans un four à bois chauffé à 425 degrés Celsius, dont les braises brûlantes ont été ramenées sur un côté. Une demi-minute plus tard, il pivote la pizza de deux quarts de tour, pour qu’elle puisse cuire de façon homogène. Il tapote ensuite deux fois habilement avec la longue pelle à pizza, et le tour est joué. L’art de la pizza, c’est à la fois une science moderne et des gestes transmis de génération en génération.
Ronde comme une assiette
Le rythme au four est très élevé, mais le pizzaiolo et le fornaio forment une machine bien huilée. Votre pizza est prête en trois minutes. « Le temps de cuisson est bref grâce à la température élevée », explique Enzo. « Les légumes sont soumis à un choc thermique et conservent ainsi leurs jus et leurs saveurs, et le fromage n’a pas le temps de brûler. Il faut aussi éviter que le fromage et les tomates touchent la plaque de cuisson. Voilà pourquoi on ne peut pas garnir le bord : celui-ci gonfle dans le four et maintient les ingrédients à leur place. Une pizza est, en somme, une assiette comestible à base de pâte. »
Envie d’une pizza frite ?
Certains Napolitains prétendent qu’il n’existe que deux vraies pizzas : la marinara et la margherita. Enzo n’est pas d’accord. Il se plaît à expérimenter avec de nouveaux ingrédients : figues, fleurs de courgette, lard, champignons sauvages… Mais il approfondit aussi les traditions napolitaines. Saviez-vous qu’on peut replier une pizza sur elle-même, non seulement pour la pizza calzone, mais aussi pour la frire ? Cette tradition, Enzo l’a érigée en science à sa toute nouvelle adresse. « Pour survivre, les traditions doivent être renouvelées », conclut-il. « Or, cela demande de la science, de la technologie et de la créativité. »
Portrait du maître
S’il existait une chaire universitaire pour les pizzaiolos, Enzo Coccia en serait sûrement titulaire. Il a grandi dans le quartier ouvrier jouxtant la gare centrale de Naples, où il passa le plus clair de son enfance dans la pizzeria de son père. Il y a vingt ans, Enzo a réalisé son vieux rêve en ouvrant la Pizzaria La Notizia. L’ancienne orthographe Pizzaria évoque la tradition séculaire ; La Notizia signifie qu’il y a toujours de délicieuses nouvelles à se mettre sous la dent.
La Pizzaria La Notizia a trois adresses dans la Via Caravaggio à Naples. Le n° 53 abrite la pizzeria classique, qui ne prend pas de réservations. Au n° 94, la réservation est obligatoire pour se délecter des pizzas innovantes et des accords vins et mets. Quant à Lo Sfizio, enseigne flambant neuve qui jouxte le n° 53, elle se consacre aux pizzas frites et au pain traditionnel.